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Nous sommes en 1 864 et les bourgeois se pressent dans les grands magasins de textile qui sont venus enorgueillir la capitale. Le Bonheur des Dames est l’un d’eux. Dans le foisonnement des étoffes, le livre met l’accent sur les différences sociétales.
L’écriture de Zola décrit à la perfection l’animation, l’émulation et les intérêts des notables, des commerçants et des petits employés autour de ce magasin qui ravit ses clientes. Mais ce monde enchanteur a d’autres revers comme décrits à merveille dans ces 544 pages. Un 19ème siècle entre sentiments, réalité économique et ascension sociale.
L’histoire est celle de Denise Baudu, jeune orpheline de 20 ans, fraîchement arrivée à Paris avec ses frères à Paris pour y trouver du travail. C’est ainsi qu’elle postule au Bonheur des Dames, et qu’Octave Mouret, le directeur et collectionneur de maîtresses, l’emploie, malgré son allure modeste dont se moquent rapidement ses collègues.
Mais elle doit faire face à de nombreuses difficultés, s’engluant dans les dettes de son frère. Elle est licenciée pour avoir refusé les avances de l’inspecteur Jouvet. S’il en est très déçu, Mouret ne peut revenir sur cette décision. Elle intègre ensuite un magasin concurrent, qui fait bien vite faillite. Les années passent et elle croise Octave au jardin des Tuileries et la conversation fort intéressante de la jeune femme, en pleine détresse le séduit, il organise son retour au Bonheur des Dames. Entichée de lui, elle mettra des mois à lui céder, persuader qu’elle n’est qu’une de ses conquêtes de plus. Mais Octave est bel et bien amoureux, il délaisse sa maîtresse, n’a d’yeux que pour elle, devient insupportable avec tout le personnel, incapable de comprendre pourquoi elle lui résiste. Dans le magasin, elle gravit les échelons, et s’attire des jalousies.
Pourtant elle n’a rien perdu de sa bienveillance et continue d’aider, à fonds perdu, sa famille et ceux qu’elle aime. Elle améliore aussi les conditions de travail de ses pairs. Les rumeurs vont bon train sur son lien avec Mouret, et les envieux la traitent comme une manipulatrice alors qu’elle essaie juste de se préserver n’ayant qu’une mince confiance en l’amour présumé de son directeur. Denise n’en peut plus des ragots, elle souhaite démissionner pour quitter cette atmosphère pesante. De peur de la perdre à jamais, Mouret la demande en mariage, et Denise, surprise, finit par accepter.
Le bonheur des Dames est aussi le bonheur de Denise, et de son ascension sociale, gardant toujours à l’esprit son caractère pur. Cette innocence dans le chaos et sa manière de s’adapter aux situations rendront amoureux Mouret. Il sait la conseiller, mais aussi l’écouter. Les sentiments et les émotions de la jeune Denise sont mis à rude épreuve tandis qu’elle doute dans un monde qui est bien loin de celui dans lequel elle a grandi. Dans cet univers d’étoffes et de fanfreluches, la féminité est exacerbée, tout comme le sens des affaires. Denise fait figure de sainte, alors que la différence des classes et l’arrivisme font fureur.
Le bonheur des Dames est l’une des œuvres les plus morales de Zola, la vertu est récompensée, faisant de son héroïne un personnage particulièrement émouvant.